mardi 27 février 2018

SERMENT DU PERSONNEL DE LA CONSULTATION EN LANGUE DES SIGNES

Suite à la formation des interprètes et médiateurs sourds en éthique médicale et déontologie, les participants ont été invités à faire un serment adaptés à leur fonction au sein de la consultation en langue des signes;
Il s'en est suivi, un serment en 2 versions: française et arabe, que nous partageons avec vous.



SERMENT DU PERSONNEL DE LA CONSULTATION EN LANGUE DES SIGNES

En travaillant dans la consultation en langue des signes, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité.
Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions.
J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité.
J’informerai les patients des données médicales en toutes honnêteté
Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas ma position pour les forcer à prendre des décisions en dehors de leurs convictions
Je donnerai les informations justes à quiconque qui me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.
Admis(e) dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés.
Je respecterai leurs secrets et ma conduite ne servira pas à corrompre les moeurs. Je ferai tout pour soulager les souffrances.
Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission.
Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.
J’apporterai mon aide à mes collaborateurs ;
Que les hommes et mes collaborateurs m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré(e) et méprisé(e) si j’y manque.




قسم العمل في العيادة الطبية بلغة الاشارة


أمام أساتذتي و بمحضر زملائي الكرام و تبعا للقيم العالية التي سطرتها لنا تقاليدنا فإني أقسم بالله
أن أكون مخلصا في عملي و متمسكا بالنزاهة و الشرف
سوف أحترم جميع الناس، واستقلاليتهم وإرادتهم، دون أي تمييز
وسأتدخل لحمايتهم إذا كانوا ضعفاء أو معرضين للخطر أو مهددين
بنزاهة و كرامة
حتى تحت الإكراه، لن أستخدم معرفتي ضد قوانين الإنسانية
وسوف أبلغ المرضى البيانات الطبية بصراحة
لن أخدع ثقتهم ولن أستغل موقفي لإجبارهم على اتخاذ قرارات خارج معتقداتهم
سوف أعطي المعلومات الصحيحة لأي شخص يطلب مني.
و لا أتقاضى أجرا غير مناسب على ما أقدمه من عمل
سوف يكتم لساني الأسرار التي تعهد إلي
و لا أساهم و لا أشجع على الجريمة و تدهور الأخلاق
سأفعل كل شيء لتخفيف المعاناة.
وسأحافظ على الاستقلال اللازم لإنجاز مهمتي.
لن أتعهد بأي شيء يتجاوز مهاراتي. وسوف أحافظ علیھا وتحسینھا لضمان أفضل الخدمات التي سیتم طلبھا.
وسوف أساعد موظفي مكتبنا.
سوف أكون شاكرا الله على منه و نعمه حتى أمضي أيامي و ليالي في خدمة عباده فأخفف من آلامهم و أواسي قلوبهم

أسألك اللهم الرضا إذا ما إلتزمت بهذه البنود و العفو و المغفرة عند كل تقصير

samedi 24 février 2018

Signature de la convention entre le Ministère de la Santé et l'AVST pour la collaboration en matière d'accès aux services de soins pour les personnes sourdes

La population sourde en Tunisie est peu connue et les données  épidémiologiques et démographiques restent insuffisantes :
-       Dans le monde : environ 5.5% de déficit auditif.
-       En Afrique: au moins 1% de déficit auditif sévère à profond
-       En Tunisie : environ 6 % de déficience  auditive ce qui suppose 15 000 sourds potentiels locuteurs de la langue des signes tunisienne ayant pour la majorité peu d’accès à la lecture et l’écriture. A noter que les organisations de personnes sourdes rapportent un chiffre de 60 000 personnes porteuses d'un handicap auditif.

La population sourde communique via la langue des signes tunisienne (LST) qui est reconnue dans des textes de loi depuis 2006.
Pour les personnes sourdes ou malentendantes, les modalités d’accès aux soins, dans le secteur public ou privé, se passent dans un milieu non adapté à la personne sourde (salle peu éclairée, médecin ou professionnel de santé, méconnaissant la LST, débordé et qui n’accorde pas assez de temps au patient sourd) ce qui implique une mauvaise prise en charge des affections des personnes sourdes, ou encore, une mauvaise conformité aux prescriptions médicales lors de l’accès aux soins.
En plus, les consultations se passent généralement en présence d’une tierce personne ce qui impacte le secret médical et peut poser problème quand il s’agit d'infections sexuellement transmissibles ou de pathologies se rapportant à des sujets socialement jugés tabous.
Là où des consultations en langue des signes se sont ouvertes (France, Uruguay..), des recherches spécifiques ont pu être menées et tous les indicateurs montrent avant la création de ces consultations, un niveau de soins inférieur à celui de la population du pays. On peut supposer qu'il en est de même en Tunisie.
La consultation pilote en LST en Tunisie, première et unique en Afrique du Nord et au Moyen Orient, a été pensée et conçue suite à la prise de conscience que la LST est un enjeu majeur pour l’accès des sourds aux services de santé et vient de souffler sa première bougie :
Tout commence en 2008 où il y a eu le recrutement de 3 interprètes dans 3 hôpitaux du grand Tunis suite à la demande des associations des personnes sourdes. Cependant, ils occupaient des postes administratifs et la population sourde n'a pas bénéficié de leurs services.
Au cours de cette même période, un groupe d’étudiants de la faculté de médecine de Tunis a initié un club pour l’apprentissage de la LST, pendant 3 ans (convention entre l’AVST[1]  et la Faculté de Médecine de Tunis). Le niveau atteint n’était pas élevé mais plusieurs étudiants devenus de jeunes médecins ont été sensibilisés aux besoins de la population sourde et motivés pour une utilisation professionnelle de la LST.
A la révolution tunisienne, une réflexion sur les droits, l’accès et la citoyenneté a été mise en avant dans un élan révolutionnaire, une ivresse du tout possible, le Rêve Tunisien…
En 2012, les sourds ont mis en avant la question de l'accès aux soins en langue des signes comme une question prioritaire. Ils ont organisé une semaine de conférences et réflexions sur ce thème en invitant Sources (association à l'origine de la création de la première consultation en langue des signes à La Salpêtrière – Paris en 1995).
En 2013, soit une année après, ont commencé les premières réflexions communes entre la Faculté de médecine de Tunis, l’AVST, la Direction régionale santé de Tunis, Sources et Handicap International sur un service de santé inclusif pour les personnes sourdes.
En janvier 2016, la direction régionale de la santé de Tunis a impulsé l'ouverture de la consultation pilote en LST, au centre de santé de Djebel Lahmar à El Omrane (Tunis), un projet petit mais ambitieux qui offre plusieurs services (Consultation de médecine générale, Consultation par une sage-femme, Vaccination, Infirmerie, Pharmacie, Orthophonie, Kinésithérapie, Psychologie). Une formation en LST visant l'équipe soignante a été lancée de façon concomitante, créant une dynamique collective constructive.
Des financements extérieurs ont permis de développer cette consultation :
-       en  octobre 2016 : Formation d'un médiateur sourd à Aix Marseille Université (Sources).
-       en novembre 2016 : financement de 12 000 TND par le Service de Coopération et d’Action Culturelle de l’Ambassade de France en TUNISIE au bénéfice de l’AVST
Une année après, une évaluation a retrouvé les résultats suivants :
-       Les consultants sourds viennent de quartiers éloignés ;
-       L’indication de l’adresse et du trajet à suivre pour consulter étaient et restent encore un défi pour les personnes sourdes ;
-   Suite aux consultations de médecine générale, il y a parfois un besoin d'investigation ou de références, pour lesquels les sourds sont adressés aux structures correspondantes (Centres Hospitaliers Universitaires) et généralement accompagnés par l'interprète ;
-       En une année, 56 personnes sourdes ont consulté. Ce chiffre paraît faible mais s'avoisine à celui observé lors de la première année en 1995 à Paris et en 2012 en Uruguay. Le développement en Tunisie est imprévisible pour cette activité novatrice, mais on pourrait s’attendre à 200 à 250 patients par an, dans les 3 ans à venir.
Même si ce projet semble de petite envergure avec peu d’impact au jour d’aujourd’hui, il a néanmoins des atouts indéniables ; les moyens matériels sont modestes mais la chaleur humaine et l'engagement sont remarquables.
Ce projet permet également à l’AVST, un apprentissage de terrain de la collaboration avec un vis-à-vis institutionnel avec une nette acquisition d’autonomie et une réelle mobilisation de nombreux membres volontaires pour accompagner les consultants, et participer aux actions de prévention.
Via la composante sensibilisation santé, une collaboration avec d’autres associations thématiques a vu le jour, avec l’aide de la DMSU[2] pour des sensibilisations des jeunes sourds.
La pérennisation du dispositif est désormais l'objectif central.
Aujourd'hui, le 24 Février 2018, la directrice générale santé Madame Nabiha Falfoul Borsali a signé la convention de collaboration avec le président de l'AVST, Mr Rechid Hechmi.




La signature de la convention entre le Ministère de la Santé et l'AVST est la preuve de l'engagement de la Tunisie pour l’amélioration de la qualité de vie et la restauration de la dignité des citoyens dans le large cadre d'une démarche  vers la justice sociale et la non-discrimination, ainsi qu'une étape de plus vers la concrétisation de l'accès universel aux services de santé. 
Ceci s’inscrit dans une volonté de l’état à mettre en application l’article 48 de la constitution sur le droit à la santé, mais également souligne un engagement vers l’inclusion des personnes en situation de handicap comme mentionné dans l’article 48 de la constitution et l’article 24 de la CRDPH ratifiée par la Tunisie en 2008.
Le chemin déjà parcouru est satisfaisant et l’implication du ministère de la santé comme pionnier dans l'accès des personnes sourdes à leurs droits est un exemple à suivre pour les autres ministères pour assurer un accès réel aux droits humains.







 [1]Association voix du sourd tunisie


 [2]DMSU